Depuis plus de dix ans, les romans de Mathias Enard connaissent un succès qui ne se dément pas auprès du public et de la presse. La Perfection du tir en 2003, mais aussi Zone en 2008, Parle-leur de batailles, de rois et d’éléphants en 2010 et Rue des voleurs en 2012 ont remporté des prix littéraires de grand renom (le prix des cinq continents de la francophonie 2004 pour La Perfection du tir ; le prix Décembre2008, le prix du Livre Inter 2009 et le prix Candide 2008 pour Zone ; le prix Goncourt des Lycéens 2010 pour Parle-leur de batailles… ; le prix Liste Goncourt et le prix Choix de l’Orient 2012 pour Rue des voleurs). Plusieurs de ses ouvrages ont été traduits en allemand, en anglais et en espagnol. Remonter l’Orénoque a été porté à l’écran en 2012 sous le titre A cœur ouvert (direction Marion Laine). Enfin, le jury du prix Goncourt, qui veille à consacrer le « meilleur ouvrage d’imagination en prose », a opté en 2015 avec Boussole pour un roman dans lequel « l’imagination » romanesque a pour support une époustouflante érudition portant sur l’Orient dans le contexte de ses échanges avec l’histoire et la littérature européennes dès la fin du dix-huitième siècle.

Malgré ces incontestables succès, l’œuvre de Mathias Enard n’a, à ce jour, pas encore retenu l’attention de la critique universitaire à laquelle elle fait pourtant de nombreux clins d’œil. Nourris par un savoir académique auquel ils rendent hommage, les romans d’Enard sont accessibles à différents niveaux : de La Perfection du tir à Boussole, ses romans thématisent les violents conflits qui affectent les régions du bassin méditerranéen. De plus, ils sont riches en références érudites à l’histoire et à la culture, tant européenne qu’orientale. Or, ce savoir n’est pas seulement la toile de fond de la trame romanesque, comme c’est le cas dans Zone, il détermine dans Boussole les orientations de vie des protagonistes et anime leurs échanges les plus intimes.

Au cours de ces journées, nous chercherons à comprendre les modalités narratives qui permettent à l’auteur de transformer l’érudition en roman, mais aussi à situer son œuvre dans un contexte littéraire actuel qui semble s’éloigner des investigations personnalisantes et s’ouvrir à l’histoire.

Beitrag von: Lena Seauve

Redaktion: Marcel Schmitt