Frist: 2022-09-01

Marina Ortrud M. HERTRAMPF / Xiaomeng XIE

La littérature migratoire n’est plus une nouveauté dans la littérature francophone contemporaine. Dans la littérature québécoise, par exemple, le mot « migrant » dans la nomination de ce courant littéraire a même fait l’objet de vive contestation. Nepveu a articulé une association « innée » de la littérature québécoise à l’exil, au manque, au pays absent avant d’analyser l’ambiguïté des écritures migrantes québécoises : « d’un côté, cette peur de la pollution, souvent paroxystique ; de l’autre, ce culte de l’hybride et de l’impureté. » (Nepveu 1998 : 210)
En poursuivant cette piste critique, d’autres chercheurs ont fait remarquer un « Orient » « désorienté et désorientant » (Dubost et Gesquet 2013), qui renforce un discours social en faveur de l’intégration culturelle et qui risque en même temps de diluer la littérature nationale avec une représentation stéréotypée de l’« Orient » (Benalil et Dupuis 2005 ; Dupuis 2005, 2007 ; Hentsch 1988). Ces critiques rejoignent l’idée développée par Edward W. Said (1978), qui préconise une contre-représentation résistant à un exotisme voulu et à une curiosité « malsaine » envers l’Autre. Il n’est donc pas étonnant que certains écrivain(e)s « migrant(e)s », suite à ces critiques, tendaient à « universaliser » leur littérature tout en « s’éloignant de la mouvance » (Biron, Dumont et Nardout-Lafarge 2007). Il n’est donc pas surprenant que, dans la littérature actuelle (post-)migratoire, on puisse observer différentes formes d’un orientalisme « autre » qui s’est développé après l’orientalisme « colonial ». En effet, parallèlement aux nouvelles formes de post-orientalisme occidental (Dabashi 2009), des formes d’orientalisme de l’intérieur, d’une perspective orientale alors, ont émergé (Hertrampf 2020 ; Pouillon et Vautin 2011). Il s’agit donc des révisions marquées par des emprunts et réappropriations réciproques, des interrelations entre le centre te la périphérie, entre le global et le local, entre les essences et les constructions historiques et mentales. En effet, ce sont précisément ces phénomènes d’entrecroisement des notions de l’orientalisme occidental et oriental que nous voulons explorer dans notre panel en mettant l’accent sur les perspectives féminines.
Nous nous proposerons alors d’aborder la question de savoir dans quelle mesure les contacts et les conflits culturels, linguistiques, religieux et idéologiques entre l’« Orient » et l’« Occident » se reflètent dans les textes narratifs de femmes auteurs qui ont elles-mêmes connu la migration et l’exil. Ce faisant, nous voulons examiner dans quelle mesure le fait d’être une femme donne lieu à différentes perceptions de soi et de l’autre, et dans quelle mesure les formes internes et externes d’orientalisme jouent un rôle à cet égard. En d’autres termes, nous voulons explorer dans quelle mesure les images de soi et de l’autre, les images orientales et occidentales des femmes et des rôles stéréotypés du genre entrent en contact ou en conflit dans ces textes, et quelles conséquences cela a sur l’identité des femmes dans l’entre-deux entre la culture d’origine et la culture d’accueil.

Les résumés, d’environ 300 mots, accompagnés d’une brève notice bio-bibliographique, sont à envoyer d’ici le 1er septembre 2022 à Marina Ortrud Hertrampf (marina.hertrampf@uni-passau.de).

Les contributions finalisées devront être soumises avant la fin de l’année 2022.

La publication du volume collectif est prévue pour la fin de l’année 2023.

Bibliographie sélective
Benalil, Mounia, Dupuis, Gilles, Chartier, Daniel, « Orientalisme et contre-orientalisme dans la littérature québécoise », in Voix et Images 31.1, 9-13.
Benalil, Mounia et Przychodzeń, Janusz, Identités hybrides : Orient et orientalisme au Québec, Montréal, Université de Montréal, 2006.
Biron, Michel, Dumont, François, Nardout-Lafarge, Élisabeth (dir.), Histoire de la littérature québécoise, Montréal, Boréal, 2007.
Dabashi, Hamid, Post-Orientalism. Knowledge and Power in a Time of Terror. With a new introduction by the author, New York, Routledge, 2009.
Dubost, Jean-Pierre et Axel Gesquet (dir.), Les orients désorientés. Déconstruire l’orientalisme, Paris, Éditions Kimé, 2013.
Dupuis, Gilles, « L’Orient désorienté », in : Voix et Images 31.1, pp. 101–114.
Hentsch, Thierry, L’Orient imaginaire, Paris, Minuit, 1988.
Hertrampf, Marina Ortrud M., « Les enjeux de l’« orientalisme (post-)migratoire » : (re-)constructions littéraires de l’orient », in Jochen Mecke et Anne-Sophie Donnarieix (dir.), La délocalisation du roman. Esthétiques néo-exotiques et redéfinition des espaces contemporains, Francfort/M., Lang, 2020, pp. 103-115.
Nepveu, Pierre, L’écologie du réel : mort et naissance de la littérature québécoise contemporaine, Montréal, Boréal, 1999.
Pouillon, François et Jean-Claude Vautin (dir.), Après l’orientalisme : L’Orient créé par l’Orient, Paris, Karthala, 2011
Saïd, Edward W., L’Orientalisme, Paris, Seuil, 1978.

Beitrag von: Marina Ortrud Hertrampf

Redaktion: Robert Hesselbach